Ne pas courber l’échine au moindre vacarme en provenance de Paris, Washington ou Berlin!

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Session du Conseil des Etats, printemps 2014

La Convention sur les successions entre la Suisse et la France doit être rejetée

par Marianne Wüthrich, docteur en droit

Les convoitises de l’étranger n’en finissent pas. Au lieu de mettre de l’ordre dans leur propre budget, les autorités fiscales de plusieurs pays du monde occidental tentent de plus en plus impudemment d’avoir accès aux petits Etats ayant une situation financière saine et à leurs citoyens et industries.
Dans une telle situation, il faut contre-braquer. Ainsi, le 12 décembre 2013, le Conseil national a rejeté la Convention en matière de successions que le gouvernement français voulait imposer à la Suisse. Les assurances de la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf – «nous n’avions pas d’autre choix que d’avaler cette couleuvre» selon la devise «Mieux vaut un mauvais accord que rien du tout» – ont produit l’effet contraire: le Conseil national a refusé d’entrer en matière avec un Non massif (122 contre 53). Ainsi, nos parlementaires ont prouvé être de dignes représentants du peuple suisse. Maintenant, il n’y a plus qu’à espérer que le 18 mars 2014, le Conseil des Etats confirmera cette décision univoque.

En mai 2011, le gouvernement français a annoncé son intention de résilier la «Convention entre la Suisse et la France contre les doubles impositions sur les successions» datant de 1953 et lui a adressé un ultimatum: soit vous acceptez un nouvel accord élaboré par Paris, soit nous taxerons à l’avenir les héritiers vivant en France tout simplement selon la législation française. Au lieu de s’opposer à cette exigence insolente de la part de ce grand Etat limitrophe, la cheffe du département des Finances s’est soumise une fois de plus et a signé un accord qui est, même selon ses propres mots, préjudiciable pour la Suisse: «Sans accord, tout ce que vous ne voulez pas et que vous craignez aujourd’hui arrivera; nous le savons tous. Avec l’accord, il arrivera un peu moins de ce que vous ne voulez pas.» (Widmer-Schlumpf lors du débat au Conseil national du 12/12/13)
Ce comportement inadapté de la part d’un membre gouvernemental a été caractérisé de manière claire et nette par un citoyen romand dans Horizons et débats no 25 du 12/8/13 («La prestation lamentable de Mme Widmer-Schlumpf a des conséquences catastrophiques» par Philippe Barraud, journaliste et écrivain, canton de Vaud).

Imposition des héritages en France centraliste et en Suisse fédéraliste

Il est conforme à la conception juridique générale et au droit international que lors d’un décès, l’héritage soit taxé au domicile du défunt, du testateur. S’il laisse une propriété, elle est taxée là où elle se trouve.
Mais l’accord dicté par Paris prévoit que le fisc français s’en prendra à l’avenir non pas seulement aux testateurs en France, mais également aux héritiers domiciliés en France – même si le défunt a vécu en Suisse et que des immeubles suisses sont concernés. Ces dispositions concernent entre autre 180 000 Suisses vivant en France. Un grand nombre d’entre eux se préparent déjà à quitter la France pour revenir en Suisse. Le fait est que les taux de successions françaises sont énormes: Paris exige des héritiers jusqu’à 45%.
En revanche, la taxation des successions est réglée de manière fédéraliste en Suisse. Selon la volonté des citoyens, les descendants directs du défunt, donc les enfants et petits-enfants, ne doivent pas passer à la caisse dans la plupart des cantons. L’idée de base de cette exonération d’impôts est que l’héritage a été élaboré au sein de la famille. Les parents et les grands-parents ont déjà payé leurs impôts sur les revenus et la fortune au cours de leur vie. Ce qu’ils ont économisé et pu mettre de côté pour leurs descendants ne doit pas être imposé une seconde fois.

Une non-entrée en matière ou au moins un renvoi au Conseil fédéral est nécessaire

Le 18 mars 2014, nous, en tant que citoyens, attendons du Conseil des Etats une décision aussi claire que celle que le Conseil national a adopté lors de la session d’hiver: il a décidé de ne pas entrer en matière sur une «convention» aussi défavorable à notre Suisse souveraine. La Commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) a toutefois demandé au plenum d’entrer en matière mais de renvoyer le dossier au Conseil fédéral pour qu’il le renégocie (communiqué de presse de la CER-E du 13/2/14).
Cette solution est la variante minimale face au dictat de l’étranger.

Quelques extraits des débats au Conseil national du 12 décembre 2013

–    Non aux traités intergouvernementaux qui n’apportent des avantages qu’à l’autre partie.
    «Selon l’avis de votre CER (Commission de l’économie et des redevances) et après avoir examiné tous les points, la France pourrait, dans cet accord, imposer ses intérêts trop unilatéralement et elle serait la seule gagnante.» (Thomas Maier, PVL, ZH, président de la Commission)

–    Le fédéralisme et la souveraineté des cantons doivent être respectés – les cantons suisses romands se sont opposés à cet accord.
    «Si l’on considère le fédéralisme et la souveraineté des cantons, il n’est pas acceptable de s’écarter de ce principe de taxation au domicile du défunt. Ce sont d’ailleurs les cantons qui y sont fortement opposés, par la voix des ministres des Finances des cantons, notamment suisses romands, cela est vrai.» (Jean-René Germainier, PRL, VS)

–    Un mauvais accord suite à la trop grande indulgence du Conseil fédéral.
    «Depuis des dizaines d’années, la France a mal à ses finances: les déficits s’accumulent, les dettes également. Elle cherche à introduire de nouveaux impôts, cela crée la révolution – on l’a vu en Bretagne ces derniers temps à propos d’un impôt écologique. Le seul succès fiscal qu’elle a engrangé depuis un certain nombre d’années, c’est cette mauvaise convention qui a été négociée avec beaucoup de laxisme par notre gouvernement. ?
La France veut faire payer ses expatriés. […] Mais qu’on bafoue les principes de la fiscalité et qu’on sacrifie les 180 000 Suisses qui habitent en France, ça je crois que nous ne pouvons pas l’accepter!» (Jean-François Rime, UDC, FR)

–    C’est toujours la Suisse qui est perdante.
    «Le groupe PDC/PEV a l’impression, qu’avec la France notamment, les concessions se font à sens unique […]. C’est toujours la Suisse qui devrait, en quelque sorte, abandonner du terrain, au moment où la France – on l’a appris il y a quelques jours – a un retard de paiement de dizaines de millions de francs en faveur de la Suisse.» (Dominique de Buman, PDC, FR)
–    Montrons un peu plus de biceps en négociant avec d’autres pays.
    «Le groupe libéral-radical, d’une seule voix, vous demande de ne pas entrer en matière sur la Convention de double imposition entre la France et la Suisse. […]
Il n’y a donc aucun vide juridique dans l’ancien l’accord, contrairement à ce que l’on a prétendu, puisque l’on a le respect complet du modèle de convention de l’OCDE.
[…] Il convient de nous réveiller, de ne pas accepter ce diktat d’un pays voisin et ami. Disons clairement non à cette convention! Et si celle de 1953 est résiliée, retournons à la table des négociations, mais avec un petit peu plus de biceps!» (Christian Lüscher, PLR, GE)

–    D’autres pays pourraient suivre – et les Suisses quitteraient la France.
    «En cas d’approbation de cette convention, nous craignons également que cette pratique imposée par la France dans le cadre des négociations ne fasse école en vertu de la clause de la nation la plus favorisée. Il est vrai que d’autres pays – nous avons cité par exemple l’Allemagne – pourraient être tentés d’aller dans ce sens, ce qui pourrait avoir des effets pénalisant pour les citoyens suisses domiciliés à l’étranger. […]» (Jaques-André Maire, PS, NE)

Nous avons besoin de négociateurs s’engageant pour une Suisse forte

Le Conseil fédéral devrait prendre pour exemple le ministre Walter Stucki. Ce Suisse, honnête et courageux, n’avait peur ni du régime nazi, ni des puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale. Il s’est toujours engagé pour les intérêts de la Suisse – et il a toujours gardé sa dignité. («Der ‹grosse Stucki›, Eine schweizerische Karriere von weltmännischem Format» par Konrad Stamm, Zurich 2013). La biographie de cette personnalité étonnante sera présentée dans nos colonnes prochainement.     •

Il y a quelque chose qui cloche!

Lors des débats au Conseil national, la conseillère fédérale Widmer-Schlumpf a prétendu qu’elle avait mené les négociations d’un commun accord avec les cantons. Ce qu’elle tait: les cantons suisses romands se sont clairement opposés à cet accord (cf. intervention du conseiller national Germanier)
Sa déclaration que l’accord est conforme aux critères de l’OCDE est également erronée. (cf. intervention du conseiller national Lüscher).
* * *
Nous exigeons de nos conseillers fédéraux qu’ils commencent enfin à défendre réellement les intérêts de notre pays et de notre peuple face à l’étranger, au lieu de se soumettre aux «grands» pour mieux leur plaire!

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