Angela Merkel en Suisse – un écho

Angela Merkel en Suisse – un écho

thk. Le 3 septembre, la chancelière fédérale allemande Angela Merkel séjourna en Suisse pour une visite officielle. Elle fut accueillie avec tous les honneurs à l’aéroport de Berne-Belp. Puis, elle mena des entretiens avec la cheffe du département de Justice et présidente de la Confédération Simonetta Sommaruga, ainsi qu’avec les conseillers fédéraux Johann Schneider-Ammann, Doris Leuthard et Didier Burkhalter. Au cours de cet après-midi, eut lieu une conférence de presse commune avec la participation d’Angela Merkel et de Simonetta Sommaruga. Puis, le cortège se rendit à l’Université de Berne, où on décerna à Mme Merkel un doctorat honoraire. Après quelques heures, l’apparition fut terminée et elle quitta la Suisse en direction du Nord.
Ce n’est pas une tâche facile d’évaluer cette visite rétrospectivement. Des voix critiques parlent d’une visite privée chez Mme Sommaruga, n’ayant rien apporté outre des frais élevés. Mme Merkel passa en tout et pour tout six heures en Suisse. Voilà un temps bien court pour la complexité des questions et problèmes en suspens entre nos deux pays. Le public n’eut connaissance que de ce qui fut abordé lors de la conférence de presse et cela se réduit à bien peu de choses. Au préalable de la conférence, on avait déterminé quels représentants des médias auraient le droit de poser une question – uniquement quatre interventions étaient admises, le temps étant limité.
Lors de la conférence de presse, les deux dames paraissaient d’accord sur tous les points – voilà qui est pour le moins étonnant. Elles insistèrent sur le point que depuis le 9 février 2014, la situation initiale pour une coopération entre la Suisse et l’UE était «difficile». N’est-ce pas un peu étrange qu’un représentant d’un pays gouverné par une démocratie directe s’exprime de cette manière sur le résultat d’une votation populaire? Le fait qu’on ait transformé la relation entre l’Allemagne et la Suisse en une relation de fratrie, entre le grand frère allemand et la petite sœur suisse, semble s’inscrire dans l’air du temps, mais cela n’a certes pas sa place lors d’une visite officielle dans un pays souverain. On ne tarit pas d’éloges mutuels, trop à notre goût, vu la relation plutôt tendue en raison du nombre de problèmes non résolus. On semblait avoir oublié les données bancaires volées, le litige entre la Suisse et l’Allemagne pour une répartition équitable des nuisances sonores du trafic aérien et d’autres tentatives de pression envers la Suisse. C’était désagréable de voir à quel point la présidente de la Confédération suisse faisait du zèle auprès de la Chancelière fédérale allemande.
Le fait que Mme Sommaruga parla souvent d’Europe au lieu d’Union européenne, n’était certes pas qu’un lapsus. Elle exprima clairement que la voie bilatérale avec l’UE devait être «développée et renforcée». Dans ce contexte, déclara-t-elle, il ne s’agit pas uniquement de la question de la libre circulation des personnes mais aussi de l’accord-cadre institutionnel prévu pour réguler et définir la reprise automatique («dynamique») du droit de l’UE ainsi que de la question de savoir qui décidera lors de litiges entre la Suisse et l’UE. Il s’agit donc de l’adaptation du droit, de la surveillance, de l’interprétation juridique, des règlements de conflits et en fin de compte de la question de la souveraineté.
Au moins verbalement, Mme Merkel exprima son respect face à la décision du peuple suisse du 9 février 2014, mais elle fit clairement comprendre que la libre circulation des personnes faisait partie des libertés fondamentales de l’UE et qu’elle n’était donc pas négociable. Mme Sommaruga le confirma en affirmant à plusieurs reprises que cette situation initiale était difficile. Les vagues de refugiés furent également mentionnées – il est intéressant de noter que là, les deux femmes étaient unanimes.
Pour le décernement du doctorat honoraire, on avait prévu beaucoup de temps. La cérémonie dura presque une heure. Lors de son allocution à l’Université de Berne, Mme Merkel souligna que le fait que tous les pays membres de l’UE avaient soutenu les sanctions contre la Russie, suite à la crise en Ukraine, avait été un succès. Cependant, on est en droit de se demander si ce procédé envers la Fédération de Russie est conforme au droit international – le droit international auquel Mme Merkel aime se référer. Divers spécialistes renommés dans ce domaine, dont le professeur Alfred de Zayas et Idriss Jazairy, Rapporteur spécial des Nations Unies «sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme», le mettent sérieusement en doute, car des mesures coercitives arbitraires contre un Etat ou un groupe d’Etats ne peuvent être sanctionnées que par le Conseil de sécurité de l’ONU – cela n’a pas eu lieu dans le cas des sanctions de l’UE.
Comme lors de la conférence de presse, tout observateur lambda pouvait obtenir l’impression que la Suisse et l’Allemagne étaient entièrement d’accord sur tout. Il est toujours souhaitable de développer une relation «amicale» avec un Etat voisin, mais il ne faut jamais oublié qui il est. La rencontre entre Mme Merkel et Mme Sommaruga laissa une impression très mitigée, on était plus soucieux des apparences que de la substance. Les questions politiques pressantes ne furent pas clarifiées – n’était-ce réellement qu’un entretien entres sœurs?    •

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