«iigfädlet» – Histoire du textile en Suisse orientale

«iigfädlet» – Histoire du textile en Suisse orientale

Expositions et manifestations jusqu’au 29 octobre 2017

par Brigitte von Bergen

Huit musées dans les cantons de Saint-Gall et d’Appenzell Rhodes-Extérieures participent à la présentation de l’histoire régionale du textile. Car «la Suisse orientale fait sans aucun doute partie des régions historiques du textile les plus remarquables; pas seulement en Suisse mais aussi en Europe», déclare Matthias Weishaupt, Président du Conseil d’Etat [«landammann»] d’Appenzell Rhodes-Extérieures, lors du vernissage de l’exposition au Musée du textile de Saint-Gall. A la campagne, on fabriquait, soit à domicile, soit dans les fabriques, des tissus pour le marché mondial qu’on commercialisait dans les centres. Aujourd’hui encore, on brode ici des tissus de haute valeur pour une clientèle internationale. La curatrice du musée Isabelle Chappuis s’est réjouie, lors de son discours inaugural de la collaboration réussie.
Dans un livre richement illustré, les huit expositions et leurs aspects historiques sont présentés (attention aux heures d’ouverture!). En fait partie la situation de vie des personnes qui y ont vécu et travaillé. On y demande qui a «iigfädlet, gstickt, gwobe, gscherlet ond konfektioniert» [enfilé, brodé, tissé, coupé et confectionné] (Landammann Weishaupt).

«Les producteurs et les manipulateurs. L’industrie du textile en Suisse orientale» (Musée du textile de Saint-Gall)

L’exposition est constituée de 5 domaines: les producteurs & manipulateurs, les ouvriers, les concepteurs, les créateurs et les entrepreneurs. Les échantillons exposés de tissus brodés sont riches en broderies, en motifs et en couleurs. Les motifs des tissus de la broderie de Saint-Gall sur coton blanc sont rassemblés dans de grands répertoires de motifs. On peut contempler quelques superbes robes dans les vitrines, brodées avec le point rabattu ou avec la broderie traditionnelle de Saint-Gall ou avec de très jolies dentelles de guipure, ainsi que des rideaux en tulle avec leurs fines broderies. Les concepteurs ont développé des tissus toujours plus nobles et plus spéciaux, richement brodés pour la Haute Couture, et des tissus de décoration luxueux pour les salons. Bien qu’aujourd’hui, on travaille à la machine, les broderies d’Appenzell faites à la main sont encore utilisées pour la fabrication des costumes traditonnels.

«Recherche de commissionnaires – métiers dans l’industrie du textile» (Musée du folklore en Appenzell à Stein)

Au XIXe siècle, Appenzell Rhodes-Extérieures se transforma d’une région purement agricole et alpestre en un canton de production de textile hautement industrialisé. Cela se reflète par exemple dans les petites annonces pour emplois de la «Appenzeller Zeitung» de 1828 jusqu’aux années de crise aux alentours de la Première Guerre mondiale. Les entreprises du textile de Suisse orientale y cherchaient des hommes et des femmes pour le travail en fabrique ou à domicile. Un grand nombre de ces métiers recherchés dans ces annonces sont aujourd’hui inconnus: en quoi consistait l’activité de la «Andreherin», du «Fergger» [commissionnaire], de la «Fluderstickerin», de la «Verschneiderin» ou du «Streicher» travaillant avec de la dentelle en soie?
Le travail d’enfants est également thématisé, car au XIXe siècle, celui-ci n’était dans aucun canton suisse aussi répandu qu’en Appenzell Rhodes-Extérieures. La première loi des fabriques de 1877 interdisait certes l’embauche d’enfants de moins de 14 ans; toutefois, ces paragraphes ne valaient pas pour les enfants travaillant à domicile. Cela avait aussi des conséquences au niveau social, puisque le travail dans les ateliers de tissage situés dans des caves humides était non seulement mal rémunéré, mais également nuisible à la santé. L’exposition donne un aperçu sur le monde des métiers disparus depuis longtemps dans les entreprises de tissage, de broderie et d’ennoblissement. Dans le canton d’Appenzell, on peut aujourd’hui encore admirer les ateliers de tissage et les locaux de broderie typiques.

«Filage, maillage, mercerisation – le travail en fabrique» (Musée de Herisau)

Ici, on présente également des entreprises de textile d’Appenzell Rhodes-Extérieures actuelles. La première «fabrique» dénommée ainsi en Appenzell fut fondée en 1737 à Herisau – une imprimerie sur textile. La mécanisation débutant en 1780 ouvrit la voie à cette fabrique existant aujourd’hui encore. Des milliers de mains s’occupaient à cette époque de blanchir, de filer, de mailler, etc. Aujourd’hui, ces entreprises se concentrent d’une part sur l’ennoblissement des tissus en coton et d’autre part sur les tissus innovateurs pour la médecine, l’architecture, l’industrie automobile et les entreprises de production.

«Textil Haus-Ansichten au Toggenbourg» (Musée Ackerhus d’Ebnat-Kappel)

L’architecture des maisons du Toggenbourg et l’histoire du textile en Suisse orientale sont étroitement liées depuis 400 ans. Jusqu’aujourd’hui, les ateliers de tissage humides, les locaux de broderie à grandes fenêtres, la maison du commerçant, les fabriques et les quartiers d’ouvriers modernes ainsi que les belles demeures des fabricants sont témoins du travail du textile en Suisse orientale.

«Habillement maison – de la parure au vêtement» (Zeughaus Teufen)

A Teufen, il s’agit du traitement des tissus. Ici, le visiteur peut observer les artisans au travail, directement transmis des ateliers. A l’aide de croquis, on peut participer à la création d’objets et de vêtements en tissus, du slip aux chaussures de sport. Les produits finis seront présentés à la fin de l’exposition lors d’un défilé de mode.

«Pays frontière – Jacob Rohner et la broderie dans la vallée du Rhin» (Musée Prestegg à Altstätten)

La vallée saint-galloise du Rhin se développa énormément à la suite de l’invention de la machine à broder manuelle dans les années 1850. Les familles de brodeurs acquirent à crédit une machine à broder, ajoutèrent un local de broderie à leur maison et toute la famille travaillait presque jour et nuit. Avec l’introduction de la machine à broder à navette vers la fin du XIXe siècle, la production se transforma de plus en plus en direction de la production en fabrique. Jacob Rohner misa sur ce changement. Bientôt, il posséda cinq fabriques. L’exposition montre de nombreux tissus magnifiquement brodés et des vêtements venant de mains privées. La quatrième génération de propriétaires vendit l’entreprise de tradition en 1988 à Forster Willi AG, aujourd’hui Forster Rohner AG. Les chaussettes Rohner sont toujours fabriquées à Balgach et sont connues dans toute la Suisse.

«Maille filée – chances et responsabilité sociale» (Musée de Heiden)

La fabrique de chaussettes et de bas, fondée en 1930 à Heiden était le signe d’un développement avancé. Elle produisit des chaussettes chaudes et des bas solides jusque dans les années 1950, où les bas en nylon conquirent le marché. Les nouveaux matériaux demandaient de nouvelles machines et des investissements élevés. Malheureusement, l’entreprise fit faillite en 1993. Dans l’exposition, des habitants et d’anciens collaborateurs parlent de ce développement décisif et décrivent à quel point cette fabrique de chaussettes avait été importante pour eux.

Histoire du textile de la Suisse orientale

L’époque du lin – l’or blanc de 1200 à 1700

Depuis le Moyen-Age, on fabrique en Suisse orientale des tissus en lin exclusivement pour l’exportation. On appelle le lin également l’«or blanc», car le commerce avec ce tissu apportait une grande richesse aux marchands. En revanche, les revenus des travailleurs, des artisans et des paysans restaient fort modestes et aléatoires.
La linette, ou graine de lin, pousse très bien dans la région du lac de Constance. Les habitants de Saint-Gall produisaient du tissu de lin de très grande qualité. Ces tissus furent négociés au niveau international dès le XIIIe siècle. Le réseau commercial s’étendit de l’Afrique du Nord jusqu’en Russie et en Turquie.

Le coton – les débuts de l’industrialisation de 1750 à 1850

A partir de 1730, le coton d’Afrique moins onéreux remplace de plus en plus le lin. A peine cinquante ans plus tard, l’industrialisation explose en Angleterre, ce qui modifie profondément l’industrie textile suisse.
L’avènement du coton mène en Suisse orientale d’abord à la production de tissus mélangés, appelés futaines, puis de tissus en pur coton. Les tissus en coton très fin, appelés mousselines, sont particulièrement recherchés.
En Suisse, les premières machines à filer furent installées dans le couvent de Saint-Gall vers 1800. Le travail manuel des fileurs et des tisseurs fut évincé par les machines. Les premières fabriques apparaissent. Grâce à son industrie textile, la Suisse est vers 1800 le pays à la plus forte concentration de machines sur le continent européen. Le canton de Zurich était alors le centre de la filature mécanique en Suisse.

L’époque de la broderie – «Les années fastes» de 1850 à 1914

A partir de 1750, les tissus en coton sont ornés de broderies en Suisse orientale. Cela se réalise d’abord à la main, mais à partir de 1850 de plus en plus à l’aide de machines.
Le succès de la broderie repose sur la tradition de diviser la production en diverses étapes: filer, tisser, broder, finition.
Différentes entreprises ou personnes hautement spécialisées s’occupent de ces divers travaux. Saint-Gall est internationalement renommée jusqu’en 1912 grâce à la broderie mécanique. La technique de la production mécanique de la «broderie anglaise» ou de la «Guipure» [dentelle de fil ou de soie sans fond, dont les motifs sont espacés, ndt.], a été inventée ici et a contribué à rendre Saint Gall connue dans le monde entier. Les broderies sont particulièrement appréciées en Amérique et en France.

La crise de la broderie de 1914 à 1950

Vers 1912, l’industrie de la broderie en Suisse orientale connaît son apogée. Les deux tiers des ouvriers y vivaient de la broderie. Mais à peine dix ans plus tard, on parle d’une «crise majeure». Jusqu’en 1930, on élimina en Suisse orientale près de 17 000 machines à broder. Les primes de «mise à la casse» furent financées par l’Etat, pour éliminer l’orientation unilatérale de la Suisse orientale vers l’industrie textile. La pauvreté s’étendit.

La Suisse orientale de 1945 à aujourd’hui

Actuellement, les entreprises se concentrent sur des produits de niches de haute valeur ajoutée pour la Haute Couture, la lingerie ou des tissus innovants pour la médecine, l’architecture ou l’industrie automobile.

Source: Ostschweizer Rundschau du 6/9/17

(Traduction Horizons et débats)

Evénements dans les divers musées en octobre 2017

25.10.    mercredi, 19 h Cinétreff Herisau: «Das Menschlein Matthias» (film en dialecte)
27.10.    vendredi, 19 h Appenzeller Brauchtumsmuseum à Urnäsch: «Textilfabriken in Urnäsch» (conférence)
29.10.    dimanche, de 14 h à 16 h Zeughaus Teufen: «Kleider machen Leute machen Kleider III: Ergebnisse» (défilé de mode)
29.10.    dimanche, 14 h musée Ackerhus à Ebnat-Kappel: tour guidé public
29.10.    dimanche, 11 h musée à Heiden: «Finissage mit öffentlicher Führung»

Notre site web utilise des cookies afin de pouvoir améliorer notre page en permanence et vous offrir une expérience optimale en tant que visiteurs. En continuant à consulter ce site web, vous déclarez accepter l’utilisation de cookies. Vous trouverez de plus amples informations concernant les cookies dans notre déclaration de protection des données.

Si vous désirez interdire l’utilisation de cookies, par ex. par le biais de Google Analytics, vous pouvez installer ce dernier au moyen des modules complémentaires du présent navigateur.

OK