Non à la fin de l’histoire!

Non à la fin de l’histoire!

par René Roca, professeur d’histoire au lycée et directeur de l’Institut de recherche sur la démocratie directe

Dans le canton de Bâle-Ville, le Plan d’études 21 (LP21) a été introduit dans toutes les écoles élémentaires au début de l’année scolaire 2015/16. Des matières regroupées en font également partie au niveau secondaire (Sek I). A l’avenir, l’histoire et la géographie feront place aux matières regroupées «Espaces, temps, sociétés» (RZG=«Räume, Zeiten, Gesellschaften») et la biologie, physique et chimie à «Nature et technique». En tant qu’historien, je me concentre sur la matière regroupée RZG. Ce qui est présenté par la suite à l’exemple de l’Histoire est valable pour toutes diverses matières regroupées. J’aimerais préciser qu’en tant que professeur au lycée, je m’intéresse à tout ce qui touche à l’école obligatoire. Car c’est elle qui est le fondement de notre système politique de démocratie directe.

La valeur des disciplines

Soulignons qu’on ne peut pas assez insister sur l’importance des disciplines traditionnelles, développées au cours de l’Histoire. Elles sont le fruit de notre histoire des sciences. Le résultat était une structure du savoir sautant aux yeux autant dans les écoles que dans les bibliothèques et les universités. Le savoir n’est pas un bric-à-brac pouvant être «compilé» sous un terme quelconque. Un travail interdisciplinaire n’est possible que si un savoir fondamental structuré a déjà été acquis. Au niveau secondaire de l’école obligatoire, il est particulièrement nécessaire que les connaissances historiques soient transmises de manière continue.
Une fiche d’information1 du Département de l’Instruction publique de Bâle-Ville d’octobre 2016 affirme le contraire. A propos des matières regroupées, il est dit: «L’idée de regrouper les disciplines en matières regroupées doit aider à se distancier des leçons et des thèmes individuels. Les disciplines spéciales sont contraintes à la coopération interdisciplinaire. La vie des enfants et des adolescents n’est pas non plus structurée en disciplines […].» Toutefois, la dernière version du LP 21 montre, qu’au sein des matières regroupées RZG, la séparation de la géographie et de l’histoire a été majoritairement maintenue. Cependant, au lieu d’une chronologie et d’une structure systématique, on ne trouve plus que des domaines ou des champs thématiques, par exemple «Comprendre la Suisse dans ses traditions et ses transformations». Dans le programme actuel des matières regroupées RZG de Bâle-Ville, ce domaine thématique n’est pas prévu. C’est-à-dire que concrètement, dans les cours, l’Histoire n’est transmise qu’en fragments individuels, dont l’importance – mis à part quelques contenus obligatoires –, dépend de l’appréciation individuelle des enseignants.
Il est fatal de renoncer à la valeur du terme «Histoire», car ainsi on renonce à la spécificité de la pensée historique. L’accès uniquement thématique à l’histoire se fait au détriment d’une conscience de la chronologie et de l’orientation dans le temps. La conscience de l’histoire et la pensée historique sont sérieusement mises à mal.

L’Histoire en tant que discipline occupe une importante fonction intégrative

La Société suisse d’histoire (SSH), représentante de l’association de la branche des historiennes et historiens de Suisse, exige dans diverses prises de position que l’histoire soit enseignée deux heures par semaine dans toutes les classes gymnasiales. Sinon, les connaissances des contextes historiques se perdront progressivement: «Celles-ci sont essentielles pour la formation d’un jugement indépendant et pour la compréhension des structures politiques de la Suisse.» Et la SSH de souligner: «La transmission du savoir historique et politique sur la Suisse occupe une importante fonction intégrative, car, dans notre société, nous avons de nombreux jeunes gens immigrés et on ne peut pas attendre de leurs parents, eux-mêmes immigrés, de transmettre ce savoir à leurs enfants. L’histoire offre les connaissances nécessaires au niveau individuel et sociétal permettant le développement du processus d’intégration.» Cela concerne aussi particulièrement le canton de Bâle-Ville!
L’opposition des enseignants, des professeurs universitaires et des spécialistes (entre autre à l’aide d’une pétition signée par plus de 1000 personnes) contre la suppression de l’«histoire» n’a pas abouti. La RZG a donc été introduite à Bâle, combinée avec la diminution des leçons de 4 à 3 heures de cours. Maintenant, tout dépend des enseignants de l’école secondaire qui se donnent infiniment de peine et sont une fois de plus, et à juste titre, frustrés. Les victimes sont finalement les élèves.

Arrêter l’absurdité des matières regroupées!

Dans le canton de Bâle-Ville, il n’y a pas eu de sérieuses analyses concernant la dernière grande réforme scolaire. Le LP21 est déjà introduit à tous les niveaux. Bâle est présenté de manière partiale comme «canton pionnier» et les problèmes sont passés sous silence. Maintenant, on se dirige vers un nouveau désastre réformateur. Quant aux matières regroupées, il existe de graves défaillances: pas de manuels (même pas en préparation); la formation continue est souvent très théorique et éloignée de la pratique; La Haute Ecole pédagogique (HEP) offre divers modules, mais actuellement, il n’existe pas de formation particulière pour la RZG; la première formation à la HEP débutera en automne 2017; donc, les premiers enseignants formés pour l’enseignement de la RZG seront à disposition dans six ans. La solution actuelle du Département de l’Instruction publique pour ce problème: deux enseignants et/ou des enseignants non spécialisés peuvent enseigner la matière regroupée RZG. Il est encore temps d’arrêter cette absurdité!
L’opposition contre ces matières regroupées comme partie intégrante du Plan d’études 21 se renforce continuellement. Le canton de Bâle-Campagne a déjà réussi, grâce à une initiative populaire adoptée dans les urnes, à ce que les matières individuelles restent à l’école secondaire. Dans d’autres cantons, les matières regroupées sont également remises en question. La pratique pédagogique y aidant, il en sera de même pour d’autres éléments du LP21.    •

1    <link https: www.edubs.ch unterricht lehrplan volksschulen einfuehrung-lehrplan-21 faecher-und-fachbereiche fact-sheets-zu-ausgewaehlten-bereichen faktenblatt-geschichte-und-geografie-in-den-fachbereichen-nmg-und-rzg view>www.edubs.ch/unterricht/lehrplan/volksschulen/einfuehrung-lehrplan-21/faecher-und-fachbereiche/fact-sheets-zu-ausgewaehlten-bereichen/faktenblatt-geschichte-und-geografie-in-den-fachbereichen-nmg-und-rzg/view  p. 7

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