La Suisse aussi doit lutter pour le maintien de la démocratie

La Suisse aussi doit lutter pour le maintien de la démocratie

par Dieter Sprock

L’UE demande instamment à la Suisse de conclure un accord-cadre institutionnel. L’objet principal consiste pour la Suisse en l’adoption systématique à l’avenir des développements du droit de l’UE. Un comité mixte contrôlerait le respect de l’accord et, en cas de litige, la Cour de justice européenne aurait le dernier mot à dire, ce qui reviendrait à une mise sous tutelle de la Suisse.

«En Suisse, ce sont les citoyens qui contrôlent le développement juridique du pays. Avec le référendum facultatif et obligatoire ainsi que l’initiative populaire, ils disposent d’instruments de démocratie directe puissants, permettant d’atteindre le plus haut degré d’autodétermination possible.»

Afin de renforcer sa demande, l’UE subordonne l’accès de la Suisse au marché de l’électricité à la conclusion de l’accord-cadre. Elle se réserve le droit de refuser l’équivalence boursière suisse; ce qui impliquerait de couper les commerçants de l’UE du commerce boursier suisse. Et elle menace le pays de l’exclure des programmes de recherche. Le fait, qu’elle ne veuille pas non plus accepter les mesures d’accompagnement protégeant les travailleurs suisses contre le dumping salarial s’inscrit également dans le système de l’UE.

Le système de l’UE …

Les relations commerciales entre la Suisse et l’UE sont réglées par des accords bilatéraux. Il n’y a pas d’incertitude juridique rendant un accord-cadre nécessaire. Les échanges commerciaux s’effectuent dans les deux sens, avec nettement plus de marchandises circulant de l’UE vers la Suisse que l’inverse. Alors pourquoi l’UE insiste-t-elle tant sur la conclusion de ce traité?
L’UE s’est donnée pour but de créer un marché intérieur sans frontières pour les capitaux, les biens, les services et les personnes et de dissoudre les frontières nationales. Cela signifie que les capitaux doivent pouvoir circuler librement et s’installer là où ils peuvent faire le plus grand profit. Les biens peuvent être produits là où les salaires sont bas et vendus ensuite au prix maximum. Les services – y compris le service public développé avec les deniers publics, comme l’approvisionnement en eau et en électricité, l’éducation et le système de santé publique – doivent être privatisés et commercialisés à des fins lucratives. En effet, les personnes doivent être à tout moment à disposition du capital; dans ce contexte, nous parlons de sujets tels que le dumping salarial ou le recrutement de spécialistes pleinement formés provenant de pays à bas salaires. L’accord-cadre sert à faire respecter ces «libertés» et à renforcer l’intégration de la Suisse dans l’UE.
Ce n’est un secret pour personne que sous le système de l’UE, les pays économiquement faibles s’appauvrissent et les pays forts s’enrichissent. L’UE s’est tournée vers un moloch bureaucratique tenant les pays membres sous tutelle dans toutes les questions politiques et ne leur permettant aucune politique autonome. Entre-temps, la plupart des lois appliquées dans les pays membres de l’UE sont déterminées par Bruxelles. Mais, de plus en plus de pays se défendent contre le paternalisme de Bruxelles dans lequel les intérêts de leurs citoyens ne sont plus représentés.

… et la démocratie directe suisse

La Suisse est un pays souverain, dans lequel les cantons se sont volontairement regroupés sur une base coopérative pour former la Confédération. Dans l’Etat fédéral, le plus petit canton a les mêmes droits que le canton le plus peuplé.
Le respect des particularités régionales, la structure fédérale et l’autonomie des cantons a permis la coexistence pacifique de différentes langues et cultures et renforce la cohésion.
En Suisse, ce sont les citoyens qui contrôlent le développement juridique du pays. Avec le référendum facultatif et obligatoire ainsi que l’initiative populaire, ils disposent d’instruments de démocratie directe puissants, permettant d’atteindre le plus haut degré d’autodétermination possible. Le peuple s’est battu pour ce droit à l’autodétermination.
La démocratie directe suisse est probablement unique en son genre dans le monde. Dans aucun autre pays, la population a autant de possibilités de déterminer elle-même les affaires politiques, et pas seulement au niveau communal, mais également aux niveaux cantonal et fédéral.
Bien entendu, le développement mondial – l’aspiration à l’argent et au pouvoir – ne s’est pas arrêté à la frontière suisse. Et ceux qui sont prêts à renoncer à la souveraineté et aux libertés doivent s’en expliquer. En réalité, de nombreuses entreprises suisses ont déjà été acquises par des investisseurs étrangers. D’autres sont largement contrôlées par des sociétés multinationales de capitaux, dont également les grandes banques suisses.
Lorsque les directions des grandes entreprises sont liées aux détenteurs de capitaux étrangers, et qu’à leurs yeux, l’acquis démocratique de l’autodétermination ne fait qu’entraver leurs intérêts illimitées, cela représente, en effet, une grande menace pour la démocratie – et pas seulement en Suisse.
Dans son article «La souveraineté, le droit et la démocratie versus la politique d’hégémonie» (cf. Horizons et débats no 26 du 26/8/13), Alfred de Zayas, historien et spécialiste du droit international et des droits citoyens et politiques, rend hommage au modèle suisse de démocratie directe et fait appel aux citoyens suisses à se battre pour son maintien.
Alfred de Zayas: «La seule démocratie que je connaisse, c’est la démocratie suisse. Elle n’est pas parfaite. Mais elle est la seule présentant une certaine corrélation entre la volonté du peuple et la politique réelle. […] Je dois dire aux citoyens suisses: vous devez lutter pour le maintien de la démocratie directe en Suisse. Ce n’est pas seulement dans votre intérêt, c’est aussi un modèle pour le monde.»     •

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