hd. La présente interview de Willy Wimmer, ancien secrétaire d’Etat allemand au ministère de la Défense, diffusée par l’émetteur iranien «ParsToday» le 12 août, jette une lumière sur la complexité de la situation au Proche-Orient, de même que sur les dangers, mais aussi les chances d’une nouvelle politique coordonnée entre les présidents américain et russe au Proche-Orient.
ParsToday: Monsieur Wimmer, le ministre russe des Affaires étrangères et le chef d’état-major de l’armée se sont rendus en mission secrète en Israël. Puis, ils se sont rendus en Allemagne. Les médias n’ont pas rapporté grand-chose quant à la première étape de ce périple. On aurait parlé de la Syrie, c’est tout ce qu’on a pu apprendre des médias. J’aimerais connaître votre point de vue.
Willy Wimmer: Monsieur Shahrokny, il y a longtemps que je pense que nous vivons une période passionnante, comprenant de grands dangers pour la paix mondiale, mais en même temps avec de grandes possibilités concernant cette paix du monde. J’ai déjà eu l’occasion de faire part de cette vision, même publiquement, en liaison avec l’élection du président américain Trump. C’était déjà mon opinion en automne 2016, bien que je ne sois plus acteur dans le monde politique mais simple observateur averti.
Cette opinion se renforce de plus en plus, principalement du fait que le président russe Poutine et le président américain Trump ont mené, en dehors des sphères politiques, un dialogue intense concernant toutes les questions nous touchant. Pour cette raison, la visite du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et du chef d’Etat-major Valéri Guérassimov en Israël peut passer pour être normale lorsqu’on jette un coup d’œil dans les coulisses où se mènent des transactions intensives. Je serais bien surpris que cela ne mène pas à des résultats.
Qu’entendez-vous par transactions menées dans les coulisses?
Dans une telle situation, on entend toutes sortes de choses, même si l’on ne saisit pas tout. Mais cela démontre qu’on a d’un côté une action gouvernementale normale avec des ministres prévus pour cela, tels que le ministre des Affaires étrangères et celui de la Défense et d’autres encore qui assument leurs responsabilités internationales. Mais dans ce contexte du Proche-Orient et du Moyen-Orient, on entend aussi la formation des canaux d’entretiens informels, largement utilisés pour obtenir des résultats. L’exemple du gendre du président Trump, Monsieur Kushner nous en a donné une démonstration en raison de ses missions particulières concernant le Proche-Orient et le Moyen-Orient. On entend également parler d’initiatives semblables de la part de la direction de la Fédération de Russie.
En se reportant à ces faits, j’estime que, malgré tout le tintamarre mené, on peut espérer un résultat menant à une solution pacifique dans cette région. Cela repose, bien sûr, sur de grands espoirs, nous paraissant crédibles, notamment du fait de la visite de Lavrov et Guérassimov à Berlin. On peut imaginer la raison de ces visites. En général, elles ont lieu à propos de questions financières internationales. Ce ne serait pas la plus mauvaise situation, si cela permettait aux réfugiés syriens en Allemagne de retourner dans leur pays. Une telle chose doit être financée.
Monsieur Wimmer, ces deux Messieurs russes se rendirent d’abord en Israël, puis en Allemagne. Avaient-ils deux missions différentes dans ces deux pays ou s’agissait-il d’une seule mission?
J’estime que le motif de ces deux déplacements était de négocier d’une question déterminante. Après des décennies de conflits dans cette région du monde – et la souffrance suite à ces conflits est évidente –, on semble vouloir tenter de trouver une solution pacifique pour le Proche- et Moyen-Orient, englobant tous les pays touchés d’une manière ou d’une autre.
On décèle dans toutes les prises de position du président Trump – je le dis maintenant avec mes mots – qu’il s’agit moins de faire une grande guerre que d’élargir le marché pour l’industrie américaine. C’est dans ce contexte que je vois toutes ces discussions et ces voyages. Ils pourraient servir à trouver une solution de paix méritant ce nom, sans qu’au prochain moment le tout explose à nouveau. Toutefois, il faut être conscient qu’il y a dans ces pays, comme d’ailleurs aux Etats-Unis, des forces qui n’ont aucun intérêt à voir apparaître une telle solution.
Monsieur Wimmer, ce que nous observons dans le monde est autre chose que ce dont vous nous parlez. Nous entendons presque quotidiennement des menaces venant de Washington, quand je dis «nous», c’est nous les Iraniens, et le ton se fait de plus en plus dur.
Je suis d’accord avec votre perception, en ce qui concerne les paroles exprimées publiquement et publiées dans les médias, notamment de la part du président américain Trump. II se comporte – si je puis m’exprimer ainsi – comme un adolescent montrant ses muscles en ce qui concerne les questions de la sécurité internationale. Je vous l’accorde volontiers. C’est un comportement parfois assez choquant.
Au cours des dernières décennies, nous avons cependant fait nos expériences avec divers présidents américains. Ils ne se sont pas comportés de la même manière que le président Trump. Ils ont préféré immédiatement déclencher des guerres. Jusqu’à présent le président Trump n’a pas fait cela, malgré tous les dangers que son comportement peut éveiller pour la sécurité internationale. Je vous l’accorde volontiers, le problème du manque de prévisibilité des deux présidents Poutine et Trump me préoccupe aussi. Ne négligeons cependant pas les velléités israéliennes de mettre en place un grand Israël avec le risque de «mettre le feu aux poudres» dans toute la région. Ces forces sont actuellement tenues en laisse par le président Netanyahu. Cela me donne aussi quelque espoir. Vous avez parfaitement décrit les dangers existants.
Monsieur Wimmer, vous venez d’évoquer un problème qui pourrait également mener à une escalade de la situation dans la région du Proche-Orient, c’est-à-dire la dernière décision du Parlement israélien, de la Knesset. Cela a provoqué une forte irritation chez les Palestiniens et dans toute la région du Proche-Orient, ce qui ne contribue certainement pas à la paix dans cette région.
C’est effectivement une affaire importante, car elle apparaît comme un élément renforçant la situation conflictuelle. Cette décision parlementaire – auparavant très controversée jusqu’à la présidence du pays – exige que 25% de la population vivant dans ce pays et devant normalement être traités sur un même pied d’égalité, n’ait plus les mêmes droits, ce qui en fait des citoyens de deuxième classe. Il est évident que cela contribue à renforcer les tensions et cela se ressent également en Israël.
Cela porte-t-il un coup aux chances de paix dans la région du Proche-Orient?
Nous avons affaire ici à deux niveaux différents. Je me suis intéressé à la question de savoir s’il y avait certaines conditions internationales pour en arriver à une solution pacifique. Selon moi, elles sont actuellement meilleures que jamais. C’est en liaison avec la situation de politique globale et de politique régionale.
Du fait que l’Iran et la Fédération de Russie se sont mis du côté du gouvernement syrien légitime en lien avec la guerre civile, il y a maintenant des possibilités de dialogue et d’influences inexistantes depuis des décennies. Ces activités iraniennes et russes ont substantiellement contribué à ce que les Américains, les Britanniques, les Français et les Saoudiens ne mettent pas la main sur la Syrie. On est donc actuellement contraint de chercher un règlement aux nombreux problèmes. Sinon, il y a la menace de la guerre globale, ce dont manifestement personne ne veut.
Monsieur Wimmer, vous êtes donc optimiste en ce qui concerne les chances de paix dans la région du Proche-Orient?
Je le suis dans une proportion de 70 à 30%. A 70% je suis certain que le règlement se fera, les 30% représentant l’incertitude. J’estime toutefois que la ligne de combat Téhéran-Moscou-Damas ayant un complément en direction de Washington – même si cela paraît farfelu – contribuera dans un avenir assez proche à la paix, différemment des efforts entrepris ces dernières décennies. Je présume que les présidents Trump et Poutine veulent atteindre davantage qu’un prix Nobel de la Paix, et ils devraient l’obtenir.
Monsieur Wimmer, nous vous remercions de vos évaluations. •
Source: <link http: parstoday.com de news world-i42624-interview_mit_willy_wimmer external-link seite:>parstoday.com/de/news/world-i42624-interview_mit_willy_wimmer du 12/8/18 (l’interview a été enregistrée le 28/7/18)
(Traduction Horizons et débats)
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