«Le dialogue civil est et demeure une histoire à succès»

«Le dialogue civil est et demeure une histoire à succès»

Impressions de la séance de clôture de l’année germano-russe des jumelages communaux et régionaux 2017/2018

par Eva-Maria Föllmer-Müller et Klaudia Kruck-Schaer

Le 14 septembre a eu lieu à Berlin, devant une vaste assistance, la séance de clôture de l‘année germano-russe des jumelages communaux et régionaux. Des membres de municipalités impliquées, des associations locales et des bénévoles, citoyens et citoyennes, y ont pris part. L’atmosphère joyeuse et enthousiaste des quelques 900 participants, russes et allemands, régnait déjà lors de l’enregistrement au Ministère des Affaires étrangères. Le nombre de ces participants dépassait largement les attentes et les nouveaux arrivants, à peine sur les lieux, engageaient la conversation avec tous. Il était clair qu’il s’agissait là d’un engagement civil tout à fait concret, d’une réelle entente entre les peuples. Tous, ils exposaient volontiers les motivations de leur engagement dans les projets les plus divers, que ce soit en matière d’échanges scolaires ou d’échanges de jeunes, d’échanges spécialisés, scientifiques, culturels ou sportifs, ou de collaboration administrative et ce, sur un pied d’égalité et le plus souvent bénévolement.
L’évènement, grâce à la participation des ministres des Affaires étrangères russe et allemand, Sergey Lavrov et Heiko Maas, a eu une haute portée politique, tout comme auparavant la conférence de jumelages inter-villes de Krasnodar (2017).


La matinée comprenait quatre groupes de travail bien préparés:

  1. Stratégies russes et allemandes pour une amélioration de la qualité de vie dans les communes et les régions
  2. Approvisionnement énergétique et développement urbain durable
  3. Jumelages intervilles réalisés par la société civile
  4. Activités de la société civile dans le domaine social: développements, résultats et perspectives des jumelages germano-russes

Les 12 et 13 septembre à Berlin, avait déjà eu lieu la pré-conférence «De Krasnodar 2017 à Düren. Bilan – Impulsion – Perspective. Rencontres des villes-partenaires allemandes et russes». Dans un esprit commun de travail cordial et sérieux, les résultats de cette pré-conférence ont alors été présentés dans les groupes de travail, des expériences ont fait l’objet d’échanges et des perspectives ont été développées pour le travail et la collaboration à venir. Le dialogue citoyen entre Allemands et Russes, entre individus et au niveau régional était manifestement un succès.

Partenariats sociaux – une contribution à l’amélioration des relations entre les peuples

C’est justement dans le domaine de la collaboration germano-russe dans les questions sociales concernant les personnes avec handicap que se trouvent des évolutions favorables. Gulnara Vaskina, directrice adjointe de Perspective, (Moscou, Russie) a rappelé le changement de paradigmes qui s’est produit depuis la fin de l’Union soviétique dans le concept de l’être humain, orienté à présent vers les besoins individuels. Comme l’a souligné Svetlana Andreeva de Pskov, où existe depuis 1993 – avec le soutien de la paroisse protestante de Wassenberg, dans l’arrondissement d’Heinsberg – un centre médico-éducatif pour les enfants et adolescents souffrant de handicaps graves et multiples: nous considérons la personne humaine comme une créature dans l’intégralité de sa valeur et possédant sa dignité propre.
Concernant l’importance des partenariats sociaux entre institutions en Russie et en Allemagne, elle a ajouté: c’est justement par les partenariats sociaux que se produisent, par le biais de multiples et intenses rencontres individuelles et sur une très large base, une inestimable contribution à l’amélioration des relations entre les deux peuples et au fusionnement de nos cultures «d’en bas».

Enseignements d’Allemagne: privatisations – pas trop et pas trop vite

Dans un autre groupe de travail, on a traité de l’amélioration de la qualité de vie dans les communes et les régions. «Tout ce qui vient des investisseurs privés n‘est pas forcément bon pour les habitants», a dit l’ancien maire de Cologne Jürgen Roters, citant pour exemple les inconvénients dans sa ville de la privatisation de la propriété urbaine par le Crossborder-Leasing. C’est ainsi qu’il y a quelques années, un pâté de maisons conçu pour les sans-abris et les défavorisés avait été vendu à un fonds d’investissement étranger. Comme, sur une période de dix ans, absolument rien n’avait été accompli, la ville avait racheté ces biens immobiliers pour 38 millions d’euros. C’est bien sûr dans le secteur des services d’intérêt général que les communes doivent maintenir leur propriété.

Recette du succès de la coopération germano-russe: solidarité humaine, confiance, amitié

Avec une grande fierté et de nombreuses photos, Dimitri Samoïlov, maire de Perm, a présenté sa ville, dans l’Oural aux confins de l’Asie. Une première université y avait été implantée déjà en 1916. Perm possède tous les secteurs industriels importants: pétrole, aéronautique, téléphonie, industrie textile, chimie, transformation du bois, électronique, informatique. La rigueur du climat – hivers enneigés et glacés de novembre à mai – profite à la culture, car de nombreux artistes viennent alors d’Allemagne pour fabriquer les célèbres sculptures de glace. Le taux de natalité est très élevé, «pratiquement comme à l’époque soviétique». Dans la coopération germano-russe, on se focalise d’abord sur le facteur humain, qui passe avant le facteur économique. «Au niveau humain, tout se passe mieux». Ce qui ressort toujours de la coopération germano-russe, c’est le vivre-ensemble, l’amitié cordiale et la confiance mutuelle. «Le dialogue civil est et demeure, une histoire à succès – spécialement dans une époque de différends politiques entre nos pays. […] Nous ferons tout pour consolider la force des liens et la coopération civile-sociale avec la Russie, et ferons une publicité active sur le plan social et avant tout politique», a affirmé Matthias Platzeck, président du directoire du Forum germano-russe.

Les rencontres sportives et le culte du souvenir sont primordiaux pour l’entente entre les peuples, surtout chez les jeunes

Les rencontres sportives, dans les disciplines les plus diverses, sont le point d’orgue des partenariats communaux et régionaux, et cela surtout pour les adolescents. L’entente entre les peuples et la réconciliation générale sont de tous les tournois et les matchs amicaux. Gert Kolbe, ancien porte-parole de la ville de Dortmund et actuellement archiviste du club de foot BVB, a par exemple mentionné qu’il avait soutenu la ville de Rostov-sur-le-Don dans le cadre de la préparation de la Coupe du monde de football. Cette année, à l’occasion de la coupe du monde, la Sportjugend du Brandebourg, la Fédération allemande de football et le Forum germano-russe ont réalisé pour les jeunes sportifs des partenariats germano-russes dans le domaine du foot à Saint-Pétersbourg, Sotchi, Orlionok, Moscou et Rostov-sur-le-Don. Youri Starovatych, l’ancien maire de Volgograd, a rappelé, au sujet du «Souvenir autour de la paix» que les villes de Denkendorf et de Volgograd, 75 ans après la bataille de Stalingrad, avaient organisé le 9 mai 2018 un match amical entre les équipes nationales juniors (de moins de 18 ans) de Russie et d’Allemagne. Les équipes avaient ensuite déposé dans les deux cimetières de Rosochka, des couronnes fournies par le Service d’entretien des sépultures militaires allemandes.

Voyage de la paix en chariot bâché de Brück à Vieliki Novgorod

L’association du cheval de «Trait de Rhénanie (Rheinisches Kaltblut) d’élevage et de sport» de Brück mène depuis juin un programme de «voyage de la paix» avec huit chariots bâchés tirés par des attelages de chevaux particulièrement puissants. Le trajet dure trois mois, traverse la Pologne et les pays Baltes et finit à Saint-Pétersbourg et Vieliki Novgorod, c’est-à-dire sur 2300 kilomètres. Des rencontres et des discussions prennent place en divers endroits lors de ce voyage. Localement, les organisateurs remettent symboliquement de petites cloches de la paix – des copies de la grande cloche de la paix qu’eux-mêmes transportent – et des petits sacs de «seigle de la paix», le seigle représentant symboliquement la vie.

Rassembler les jeunes pour le travail de paix et de réconciliation

Au centre de toutes les discussions, il y avait toujours la question de savoir comment attirer les jeunes pour des rencontres importantes, comment augmenter leur participation à l’apprentissage du russe ou de l’allemand, et comment leur rendre accessible la compréhension de l’histoire des deux peuples. Le culte du souvenir et le travail de paix sont la fondation de tous les projets présentés.

Les partenariats intervilles pour lutter contre les préjugés et les clichés

L’engagement mis à l’exécution et la réalisation des projets est impressionnant. De nombreux participants ont fait remarquer que la réunion a permis à des citoyens de nationalités différentes de nouer des amitiés dans le cadre des partenariats intervilles. C’est ainsi qu’on se familiarise avec la culture d’autrui et qu’on le voit comme un ami. Helmut Domke, président de la Fondation des rencontres Est-Ouest, a dit que les partenariats intervilles sont le moyen approprié contre la récupération, les préjugés, les clichés et les conflits politiques. Le souvenir est donc bien plus qu’une simple rétrospective. Le souvenir est aussi l’avenir de la coopération.

«Si l’Allemagne et la Russie vont bien, cela sera bénéfique pour l’Europe aussi»

L’après-midi, le débat public s’est déroulé en séance plénière sur le thème du «Regarder vers l’avenir – les partenariats communaux et régionaux germano-russes».
La volonté civile était manifeste dans l’étendue de la palette des 250 projets de partenariat; c’était une indication de l’ampleur de l’intérêt porté par les participants à une collaboration sur un pied d’égalité. Comme l’a dit Bernhard Kaster, ancien maire et membre de la direction du forum germano-russe, le plus important, c’est l’aspect humain. Le travail commun se caractérise par le plaisir de la coopération. Il a en même temps demandé qu’à côté de l’estime politique indispensable, coexiste un encouragement financier minimal. Markus Lewe, président de la Journée des villes allemandes et maire de Münster, a souligné: «La communication les yeux dans les yeux (face to face), pas Facebook». Si l’Allemagne et la Russie vont bien, cela est bénéfique pour l’Europe aussi.

«Il y aura un dialogue de qualité – il n’y a pas d’autre possibilité»

Mikhaïl Schvydkoï, envoyé spécial du président de la Fédération russe pour la collaboration internationale du ministère des Affaires étrangères russe et membre du comité directeur du Forum germano-russe, a donné un aperçu des relations germano-russes: «Quand à Berlin le mur est tombé, j’ai pensé qu’à présent les gens allaient s’unir. Le mur s’est de nouveau élevé dans nos têtes. Nous pensions que nous devrions commencer par la société civile et sur des points tout à fait concrets, par exemple: Quelle est la solution optimale pour l’approvisionnement en eau? Ou bien, dans le domaine de la formation. Il est plus facile de tomber d’accord au niveau du quotidien, et là nous nous entendons parfaitement. «Il a souligné qu’après les deux guerres la réconciliation a effectivement été très rapide. Et aujourd’hui plus de 70% des citoyens allemands souhaitent maintenir de bonnes relations avec la Russie. Schvydkoï s’est exprimé avec optimisme: il n’y pas d’autre possibilité qu’un dialogue de qualité – cela viendra.

Développer les partenariats intervilles et les rendre viables

Peter Franke, nommé à la présidence de l’Union fédérale Est-Ouest des sociétés allemandes (BDWO), s’est référé lors de la «Déclaration finale commune» (cf. encadré ci-dessous) également aux problèmes actuels: les dépenses de l’économie allemande affectées aux projets diminuent et seuls 50% des partenariats existants sont réellement viables.
L’évènement s’est conclu sur la signature solennelle de trois nouveaux accords de participation germano-russes avec la participation des maires respectifs (Greifswald et Vyborg, Schwedt et Touapse, Lahr et Zvenigorod) ainsi que les distinctions attribuées à 30 projets de coopération germano-russes, communaux et régionaux, sélectionnés par les deux ministres des Affaires étrangères Sergeï Lavrov et Heiko Maas. En particulier, Youri Starovatitch, ancien maire de Volgograd, a été le premier à être distingué par le ministre allemand des Affaires étrangères, pour services rendus au jumelage de 30 ans entre Chemnitz et Volgograd; sous les applaudissements, il s’est à son tour adressé aux participants avant de monter sur la scène.
Le thème de l’année à venir sera consacré aux partenariats scientifiques et éducatifs.     •

Déclaration commune à l’occasion de la cérémonie de clôture de l’année germano-russe des jumelages municipaux et régionaux 2017/2018 (extrait)

L’année écoulée des jumelages municipaux et régionaux 2017/2018 a fait la preuve de manière impressionnante du grand engagement accompli en faveur de l’entente germano-russe par les administrations municipales actives, les ONG locales et les citoyennes et citoyens travaillant comme bénévoles. C’est pourquoi les jumelages communaux et régionaux sont des piliers fondamentaux des relations stables et variées entre nos pays, tout particulièrement par ces temps souvent soumis à de grandes tensions.
Ces partenariats – que ce soient des échanges entre jeunes ou entre élèves, des échanges scientifiques, sportifs ou culturels ou lors de collaborations administratives – se sont souvent développés durant des décennies et sont organisés durablement par des citoyennes et des citoyens. Ils reposent sur des relations de confiance développées mutuellement entre les acteurs.
Les partenariats municipaux et régionaux sont des actions provenant des communes, des municipalités et des régions et servent le bien-être de leurs citoyennes et citoyens. […]
Les jumelages actifs entre les villes et toute nouvelle initiative n’ont pas seulement besoin d’un encadrement et d’une reconnaissance politique, mais également de ressources financières concrètes pour que le travail puisse porter des fruits. C’est alors seulement que l’on réussira à augmenter le nombre des villes jumelées de façon significative et de mettre sur les rails de nouveaux projets dans les relations germano-russes.
Nous voudrions proposer pour cela les mesures concrètes suivantes:

  • des soutiens pour la création d’un conseil de coordination germano-russe pour les jumelages germano-russes, formé de représentants de villes allemandes et russes ou de leurs associations ainsi que des représentants d’organisations sociétales travaillant pour les jumelages de villes entre les deux pays;
  • des soutiens pour les conférences des villes jumelées germano-russes ayant lieu tous les deux ans, outre une conférence communale ayant lieu entre des rencontres officielles;
  • mise en œuvre régulière d’un forum de la jeunesse en relation avec les jumelages dans le but d’intéresser des jeunes gens à la coopération germano-russe et à la réalisation de nouveaux projets;
  • continuation et soutien du site web pour la coopération communale en tant qu’interlocuteurs pour les villes et en même temps pour créer davantage de transparence concernant les succès des coopérations régionales germano-russes;
  • financement initial sur plusieurs années pour créer de nouveaux jumelages;
  • financement sur plusieurs années pour réanimer d’anciens jumelages, pour soutenir tant les citoyens que les villes lors de telles réactivations;
  • facilitations lors de l’octroi de visa aux citoyens et aux représentants des villes engagés dans les jumelages et dans les partenariats de villes mais aussi pour les visas destinés aux échanges de jeunes et d’élèves dans le cadre des jumelages et des partenariats entre les villes;
  • facilitations pour permettre l’organisation de stages, de compagnonnages ainsi que d’échanges spécialisés et culturels dans le cadre des jumelages.

Berlin, 14 septembre 2018  

Mattias Platzeck, ancien ministre-président, président du comité directeur du Forum germano-russe  
Thomas Hoffmann, directeur de la Fondation pour les échanges germano-russes de jeunes
Peter Franke, président de l’Union fédérale des sociétés allemandes Ouest et Est
Jelena Hoffmann, présidente du comité directeur de la Fondation rencontres entre l’Ouest et l’Est

(Traduction Horizons et débats)

La brochure contient de brèves descriptions de 243 projets des régions allemandes et russes. 250 projets avaient répondu à l’appel de l’Année thématique germano-russe 2017/2018. «Chacun des 243 projets parle de personnes engagées, enthousiastes et expérimentées dans des villes, des villages et des communautés – de personnes passant leur temps libre dans des fonctions honorifiques pour faire bouger les choses. Chaque projet montre qu’il est possible, avec un petit budget, avec esprit et âme, d’opposer aux tensions politiques quelque chose de constructif, rapprochant et reliant les gens. […] C’est l’histoire concrète d’une réussite, qui est beaucoup trop rarement mis en évidence par des messages positifs, des articles ou des reportages dans les médias.» (Extrait de l’avant-propos de Martin Hoffmann, administrateur délégué du Forum germano-russe)

Disponible sur le site <link http: www.deutsch-russisches-forum.de>www.deutsch-russisches-forum.de

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