On peut et on doit contredire la théorie qui veut que les événements politiques soient le résultat de la loi inéluctable de la nature ou de l’histoire, faisant que tout soulèvement, et même toute révolution résulte nécessairement de relations sociales hostiles à la vie ou encore qui rendrait la guerre inévitable dès lors que l’on remettrait en question l’équilibre préexistant des puissances en présence dans le monde – on trouve actuellement une illustration de cette théorie dans la «thèse de Thucydide», appliquée aux fondements des relations entre les Etats-Unis et la Chine. Elle ne prend cependant pas suffisamment en compte le facteur humain, qu’il soit négatif ou positif. L’agitation, les bruits de foule et la propagande, susceptibles à provoquer des violences inutiles dans des situations socialement et politiquement tendues, contribuent à dresser les peuples les uns contre les autres. Par contre, le respect de l’autre encourage et soutient la recherche de solutions pacifiques et inclusives à l’intérieur des frontières d’un pays aussi bien que dans les relations extérieures qu’il entretient avec d’autres peuples et Etats.
Le poison de l’agitation,
de la calomnie et de la propagande
Il est bon de se rappeler, aujourd’hui encore, où peuvent mener l’agitation, la calomnie et la propagande. Les atrocités dont parlent nos livres d’histoire, toujours perpétrées de nos jours, sont extrêmes. Ce qui est le plus frappant aujourd’hui, c’est le manque de respect d’autrui qui règne aussi bien au sein de nos sociétés modernes tout comme dans les relations entre divers pays, divers peuples et les gouvernements eux-mêmes, ce qui détruit non seulement les relations personnelles existantes, mais aussi les relations politiques, en perturbant la gouvernance exercée pour le bien commun.
Manque d’orientation
émotionnelle et d’esprit communautaire
Le manque de respect pour autrui se manifeste par le mépris de leur dignité et de leurs droits, parmi lesquels les plus importants sont les droits à l’intégrité physique et à la vie. Les autres droits fondamentaux ainsi que les droits de l’homme sont cependant tout aussi essentiels. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, conformément à l’Article 1 des pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, est l’un d’entre eux.
Comment expliquer ce manque de respect pour autrui, pour les autres? Impossible de répondre en une seule phrase. Le respect de l’autre correspond à la nature sociale de l’être humain, c’est un impératif de la vie en commun. Au cours de l’histoire et de nos jours, l’exemple est venu et continue à se répandre de toutes parts et de nombreux individus. C’est très logiquement qu’en découlent le respect de la dignité humaine et des droits de l’homme. S’y opposent l’effervescence émotionnelle mal dirigée ou un manque d’esprit communautaire. Et c’est ainsi qu’on ouvre tout grand la porte aux agitateurs, aux instigateurs de complot et à leur propagande hostile– ils ne veulent pas d’un dialogue qui aboutirait à davantage d’unité entre les êtres humains, mais l’aggravation des tensions.
Une façon de museler le
dialogue dans les relations internationales
Le dialogue est également muselé dans les relations internationales. Les rumeurs qui courent depuis des années contre la Russie, et en particulier contre son actuel Président Vladimir Poutine ainsi que leurs conséquences en sont un exemple. Le 18 mars 2021, le site suisse Infosperber1 le commenta en disant: «L’Occident provoque, la Russie répondra, au sujet des paroles de Joe Bidenselon lesquelles ‹Poutine est un tueur›, on avait affaire à plus qu’une simple provocation: Il y a des règles du jeu en politique internationale aussi, commente le site, les pays, les gouvernements et les organisations ne sont pas exempts de critique, mais quant aux chefs d’Etat ou de gouvernement, il convient de s’abstenir de tout jugement personnel.» Le texte cité fait état de «briser les tabous» se référant à une analyse de Dmitri Trenin, directeur du Centre Carnegie de Moscou, datée du 21 février 2021. Le Centre Carnegie de Moscou est financé par l’argent de fondations américaines, néanmoins, l’analyse mérite d’en prendre note. On y lit, par exemple, que «l’arrivée de Joe Biden et des démocrates à la Maison Blanche signifie une pression américaine accrue et ciblée sur la Russie et sur M. Poutine personnellement, ainsi qu’un engagement beaucoup plus fort des Etats-Unis à s’immiscer dans la politique intérieure russe et dans le voisinage immédiat de la Russie.» Et le centre d’étude de continuer que «l’éventail et l’intensité des réponses possibles [russes] sont vastes. Le Kremlin envisage différentes options. Il n’agira pas à la hâte, mais il est capable d’agir rapidement et de manière unilatérale […]. La réponse de la Russie a déjà un nom: l’endiguement actif (containment) des Etats-Unis.» L’auteur du texte cité ajoute lui-même: «Quiconque a suivi la télévision russe mercredi soir [...] sait comment la rupture du tabou par Joe Biden y a été reçue: comme une insulte à tous les Russes. Les Russes savent très bien que, depuis la fin de la Guerre froide, aucun autre pays ne porte la responsabilité de davantage de morts des suites de la guerre que les Etats-Unis [...].»
Est-il donc surprenant que des études récentes menées par l’institut de recherche d’opinion Levada Center, basé à Moscou, soient arrivées à la conclusion que – contrairement aux deux décennies qui ont suivi 1990 – la majorité des Russes âgés de 18 à 24 ans ne veulent plus «d’orientation occidentale», mais plutôt d’une voie eurasienne indépendante pour leur pays?2
Une autre attitude
Dans une interview publiée le 17 mars 2021 par le journal allemand Nachdenkseiten3 Gabriele Krone-Schmalz4 a déclaré, en réponse à la question de savoir comment elle évaluait les relations actuelles de l’Occident avec la Russie: «Avec une grande inquiétude. Ce ne sont pas seulement les analyses politiques démêlant l’écheveau des intérêts et de la morale qui font défaut, mais surtout une stratégie politique qui mène à cette spirale de menaces et de sanctions. C’est une situation nouvelle où nombreux sont ceux qui emploient les mots de ‹dialogue› et ‹ouverture au débat›, tout en en dénonçant l’emploi dans la pratique.»
A la fin de l’interview, elle déclare: «Loin de moi l’idée d’élaborer des scénarios catastrophes, mais je suisfermement convaincue que ce qu’il faut, c’est une politique déterminée de détente qui agisse sans conditions préalables en vue de l’avenir. Sans mesures de confiance – qui, utilisées comme des phrases creuses, ne servent à rien mais doivent être remplies de substance – les situations résultant de malentendus risquent de devenir incontrôlables et donc le dérapage. Nous devons le réaliser et en tenir compte, surtout dans la perspective des générations futures.»
Un surprenant
rétrécissement des courants de pensée
Dans la deuxième partie de l’interview,5 MmeKrone-Schmalz aborde également la situation intérieure de son pays, l’Allemagne, en disant: «L’idéologisation et la charge morale de nos débats ainsi que la polarisation qui en résulte, qui mène inévitablement à la radicalisation – tout cela est dangereux pour une société démocratique et pluraliste qui ne supporte qu’un certain degré de polarisation pour pouvoir continuer à fonctionner. Le bouleversement climatique, la mobilité, l’égalité des droits ou le langage ‹genré› et, bien sûr, ce qui touche à la Russie – partout les courants de pensée et autres canaux d’information les canaux d’information et les faiseurs d’opinion se rétrécissent au point de nous déprimer. En d’autres termes, tout avis dissident n’est plus considéré comme faisant naturellement partie de notre société ouverte, fondamentalement vivante, mais devient un facteur de perturbation qu’il vaut mieux ne pas exprimer à voix haute, voire un ennemi à expulser avec toute la cohérence possible.»
Face à tout cela, une expérience historique s’impose: une politique étrangère de plus en plus agressive s’accompagne souvent d’une diminution des droits de l’homme à l’intérieur d’un pays. Le manque de respect pour autrui ne reste jamais limité aux «étrangers», mais finit par s’exercer contre nous.•
1 https://www.infosperber.ch/politik/__trashed-271__trashed/ du 18/03/21
2 voir Diesen, Glenn. «Hat der Westen Russland verloren? Jugend beim Abbau der europäischen Identität führend». Dans: rt deutsch du 27/03/21; https://de.rt.com/meinung/115017-hat-westen-russland-verloren-jugend/
3 https://www.nachdenkseiten.de/?p=70799 du 17/03/21
4 Le nouveau livre de Gabriele Krone-Schmalz s’intitule «Respekt geht anders. Betrachtungen über unser zerstrittenes Land».
5 https://www.nachdenkseiten.de/?p=70846 du 18/03/21
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