Les récents événements au Proche-Orient ont effrayé de nombreuses personnes. Les rapports et les images sont difficiles à supporter et leur aménagement médiatique, dans le but d’inciter les grandes émotions, nous empêche d’appréhender les événements en gardant un reste de réflexion. C’est pour cette raison qu’aujourd’hui nous devons nous rappeler le fait que chaque événement guerrier est accompagné de propagande visant à influencer une certaine opinion. Face à ces stratégies de manipulation, un vif désir s’empare de nous, accompagnant l’incontournable devoir d’accéder à des informations réelles sur les événements de guerre et leur contexte. Car il n’existe pas de raccourcis pour se forger un propre point de vue fondé et réfléchir à nos possibilités d’action de manière autonome. En le faisant sérieusement, le résultat est certain: la réflexion nous amènera au constat que les guerres ne sont pas des phénomènes «naturels», innés au genre humain, mais qu’elles font partie de la politique de pouvoir de certaines grandes puissances, que les conflits sous-jacents ont souvent une longue histoire et qu’elles sont préparées de longue date.
Nous autres adultes portons
une lourde responsabilité
Qu’en est-il de nos enfants et de nos jeunes? Quelle est leur attitude face à toutes ces informations destructives qui les envahissent massivement ces derniers temps? Beaucoup d’entre eux disposent d’un téléphone portable connecté à l’Internet et fréquentent les médias sociaux. Ils sont souvent confrontés à des nouvelles qu’ils ne peuvent pas ou difficilement classer et qui les troublent d’autant plus. Les nouvelles en images et les films qui façonnent nos actualités ont un grand impact sur eux et ils sont susceptibles de se «graver» à long terme dans leur conscience. Dans le meilleur des cas, ils nous adressent leurs questions. C’est ainsi que nous autres adultes portons une lourde responsabilité; car nos jeunes veulent et doivent sentir que nous les comprenions eux et leurs soucis et questions (souvent non exprimés). Nous ne les aidons peu ou pas du tout en les submergeant de notre savoir ou en les poussant à reprendre les nôtres. Mieux vaut avoir les capacités d’un vrai et honnête interlocuteur – un défi, certes, mais qui en vaut la peine.
Les actualités «Infotainment» et
les guerres en format «fait-divers»
L’évolution de la société au cours des dernières décennies ne facilite pas la tâche de maintenir un point de vue humain dans les situations de crise et de guerre à la génération suivante, même si les aspirations de la paix font partie de la nature sociable innée au genre humain. Après les terribles guerres du siècle dernier, notre monde n’a pas connu de répit, mais a continué, et même augmenté le ravage par des guerres qui font des millions de morts et dont, souvent, seuls les contemporains bien informés et intéressés ont pris connaissance. Dans les actualités-divertissement devenues habituelles, la guerre est présentée comme «normale»; un coupable est (trop) vite trouvé et des images deshumanisantes voire diabolisées de l’ennemi dominent l’espace public.
Assassiner et tuer – un divertissement ?
La jeune génération est touchée par un autre phénomème aussi inquiétant. Dans nos sociétés, ils sont nombreux, les enfants et adolescents à manquer désespérément de soutien émotionnel et d’encouragement dans leur famille, de «bons esprits» qui leur permettent de mieux affronter psychiquement les défis de la vie moderne. Ce manque s’aggrave avec nos écoles qui negligent de plus en plus leur raison d’être principalement sociales et de contribuer à former les enfants pour qu’ils deviennent des personnalités mûres, capables d’assumer leurs responsabilités dans la société, avec compassion et une éducation digne de ce nom.
Ce sont eux, faussement appelés «les natifs du numérique», qui risquent de se perdre dans la jungle médiatique. Au cours de leurs «aventures» d’«internautes» du numérique, ils sont souvent et soudainement confrontés à des contenus pervers et brutaux. De nombreux jeux informatiques – conçus à l’origine pour permettre aux soldats de surmonter leur inhibition naturelle à tuer – prônent le meurtre et l’assassinat comme offre de divertissement et de compétition (source de gains considérables pour toute une industrie) – malgré les avertissements de scientifiques de renom qui sont conscients de leurs responsabilités et qui expliquent à tous ceux qui ne bouchent pas leurs oreilles qu’un tel entraînement à tuer aura un effet abrutissant sur l’esprit de nos enfants et adolescents.
Qui veut abrutir nos enfants
et dans quel but?
Prenons par exemple le jeu informatique «Le Parrain», disponible depuis longtemps dans le commerce. Bien qu’il ne soit officiellement autorisé qu’à partir de dix-huit ans, beaucoup d’enfants plus jeunes y jouent. Pour avoir les meilleurs résultats dans ce jeu, les instructions leur indiquent: «Une fois votre victime rendue sans défense, vous pourrez lui donner une petite – ou une grande – raclée. Si vous vous trouvez à côté d’un adversaire blessé, l’avis ‹l’achever› apparaît parfois. Dans ce cas, appuyez sur ‹V› ou sur la touche ‹8› pour délivrer votre adversaire. Appuyez sur ‹X› ou pressez les sticks analogiques à gauche et à droite pour étrangler votre adversaire. Si la fin de votre adversaire approche, tuez-le ou accordez-lui une dernière grâce. Le mode ‹précision› vous permet de cibler les ‹points faibles› et non vitaux de votre adversaire. Il vivra ainsi suffisamment longtemps pour vous dire tout ce qu’il sait. Si vous voulez l’empêcher de s’enfuir, il vous suffit de lui tirer une balle dans la jambe.»1
Comment se fait-il que, dans une société civilisée, l’on donne de tels encouragements sadiques, à nos jeunes, en plein abus de leur système émotionnel? Dans quel but nos enfants et nos adolescents doivent-ils être abrutis? Pourquoi nos autorités ne mettent-elles pas tout en œuvre pour empêcher qu’elles apprennent à tortionner sans remords, par un enseignement efficace et des interdictions appropriées ? Face à une telle destruction mentale, les réponses habituelles et lénifiantes de la plupart de nos «experts» sont mal placées!
Une réflexion approfondie s’impose
Les adultes doivent engager une réflexion approfondie sur la manière de promouvoir une réticence face aux tentatives de se faire instrumentaliser par la violence et la guerre chez les enfants et les jeunes. Le faisant, nous profitons du fait que la nature sociale de l’enfant est de notre côté. Nous nous trouvons tout de même face à une tâche d’envergure. Surtout aujourd’hui, avec la situation actuelle qui règne dans le monde! L’Unesco, sous-organisation onusienne pour le maintien de la culture humaine, avait déjà réalisé un valeureux travail préparatoire à l’époque, ciblée sur l’impression destructive des atrocités causées par la Seconde Guerre mondiale. Elle a donc stipulé dans le préambule de sa Convention: «Les gouvernements des Etats parties à la présente Constitution, au nom de leurs peoples, déclarent, […] que, les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix», et encore ils y déclarent «que la grande et terrible guerre qui vient de finir a été rendue possible par le reniement de l’idéal démocratique de dignité, d’égalité et de respect de la personne humaine et par la volonté de lui substituer, en exploitant l’ignorance et le préjugé, le dogme de l’inégalité des races et des hommes […]»2.
Toute l’humanité est défiée
Ce que l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) a retenu à l’époque est toujours valable aujourd’hui, et cela est d’autant plus urgent dans la situation mondiale actuelle, tout comme le droit international, le droit international humanitaire et le droit de la guerre, qui ont également vu le jour suite aux terribles conséquences de la Seconde guerre mondiale. Nous avons le devoir de reprendre ce travail préparatoire, de le poursuivre et de transmettre cet héritage à la génération suivante. Il est d’autant plus urgent de nommer et de repousser les processus destructeurs qui font obstacle et de corriger les évolutions erronées, afin que nos enfants et nos jeunes puissent devenir des personnalités saines et mûres, capables de dire non à toute violence et à toute guerre et de consacrer leur énergie au désir de paix profondément enraciné chez les hommes. Nous avons là une tâche importante à accomplir, car la guerre n’est pas un mal nécessaire à l’humanité! •
1 Die Welt. «Drücken Sie ‹V›, um Ihren Kontrahenten zu erlösen»; publié le 3/10/06. https://www.welt.de/wirtschaft/webwelt/article157064/ Druecken-Sie-V-um-Ihren-Kontrahenten-zu-erloesen.html
2 https://www.fedlex.admin.ch/eli/cc/1949/334_334_ 338/fr
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