La neutralité, source de liberté et de dignité

A tous ceux qui considèrent l’inscription de la neutralité dans la Constitution comme  une notion rigide à exclure, il serait nécessaire de rappeler qu’il n’y a pas de liberté sans neutralité. La neutralité est une force qui véhicule des valeurs de civilisation: la liberté, la dignité humaine, l’unité, la coopération, la solidarité.
    En France mais aussi dans les médias internationaux, il y a eu beaucoup de débats enflammés condamnant la neutralité de la Suisse. La neutralité  étant qualifiée de lâcheté, de veulerie, je ne peux laisser dire cela car c’est un mensonge!
    Mais qui comprend la Suisse? La France? Non! L’UE? Non! Les Etats Unis? Encore moins! Le fait pour une personne ou pour un Etat comme la Suisse de ne pas participer à un conflit ou une guerre ne saurait être considéré comme une lâcheté ou une veulerie! Tout citoyen avisé sait que la solution d’un problème se trouve au-delà de la logique «tort et raison», dans un dialogue pacifique qui transcende les clivages.
    Même si à  son époque Nicola de Flue a été un ermite pour des raisons qui lui sont propres, la neutralité ce n’est pas se retirer du monde,  mais c’est être actif pour aider par la diplomatie. Et la Suisse sait très bien le faire et elle doit le faire plus activement dans le monde actuel!
    En 1955, lors de la Conférence de Bandung, les pays non-alignés d’Asie et d’Afrique  l’avaient bien compris, en refusant la division du monde et la guerre froide en deux blocs: l’Est et l’Ouest. La neutralité était le garant de leur liberté et de leur dignité après des siècles de colonisation et d’impérialisme forcené. Et ils avaient entièrement raison de le faire! La neutralité a permis aux pays qui l’ont adoptée de consolider leur construction interne en même temps que leur positionnement international. Loin d être inconvenable, la neutralité a permis de consolider l’architecture du système international.
    Défendre la paix, la démocratie, les droits de l’Homme et le Droit international sont des valeurs qui n’admettent aucun compromis ni ambiguïté. C’est un engagement qui relève de la dignité humaine, la sienne propre comme celle d’autrui. Dans un monde en turbulences, cela nécessite beaucoup de courage et d intégrité personnelle mais aussi de solidarité mutuelle dans une action collective.
    La Constitution consacre le principe démocratique. Loin de constituer une entorse à la démocratie, le contrôle de constitutionnalité garantit les conditions de la démocratie. Alors est-ce honnête de le refuser? Ou bien est-ce le déni de favoriser l’ouverture, la participation et la transparence – critères essentiels à propos de la légitimité des réformes constitutionnelles – qui animent certains?
    La Déclaration des droits de l’Homme adoptée le 10 Décembre 1948 l’a amplement reconnu «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit.»
    Comprendre en quoi l’inscription de la neutralité dans la Constitution est fondamentale c’est comprendre la nécessité de la protection de la dignité de l’Homme
    Merci pour votre attention. •

Intervention lors du colloque «Mut zur Ethik» du 30 août – 1^er septembre 2024

* Nicole Duprat, Professeur des écoles à la retraite,  Diplômée de l’Education nationale; études et formation à l’Institut de Pédagogie Saint Cassien à Marseille; études suivies de recherches à Florence (I); diplomée de l’Institut d’Etudes Politiques (Départements Diplomatie, Droit et Relations internationales) d’Aix-en-Provence; études et recherches à Ancône et Rome en Italie. Nicole Duprat exerce des activités d’Art et d’artisanat dans une association à Villeneuve-lez-Avignon (AVF). Elle vit dans la région d’Avignon (F).