Ecole chrétienne ou école woke? Curieux verdict contre une école des filles

mw. Le 17 janvier 2025, le Tribunal fédéral a fait état de sa conception bien à lui d’une école conforme à la Constitution – par un raisonnement on ne peut plus absurde. Selon l’arrêté en question, l’école secondaire de filles St Katharina («la Kathi») à Wil (canton de St. Gall) enfreindrait, d’une part «l’obligation de neutralité confessionnelle régissant les écoles publiques». En effet, selon la plus haute juridiction suisse: «La Kathi a une orientation confessionnelle ouvertement chrétienne, voire catholique. D’importantes orientations religieuses ponctuent délibérément le quotidien de l’école». D’autre part, il ne serait pas «conforme au principe d’égalité de traitement que l’accès à la Kathi soit exclusivement réservé aux filles».
    Voilà donc où nous en sommes! Une école contreviendrait-elle à notre Constitution si elle vit selon les valeurs chrétiennes? Il semblerait pourtant que cette approche-ci convienne mieux à un nombre croissant de parents que celle, devenue officielle, qui consiste à perturber l’esprit des élèves avec le wokisme, la théorie du genre et d’autres idéologies actuellement en vogue. Par ailleurs, l’école, dont la réputation est excellente dans la région, accueille des élèves de toutes les confessions et religions et promeut le respect mutuel de la religion des autres. De plus, selon l’un des juges fédéraux (minoritaire), la fréquentation de la Kathi n’est en rienobligatoire: la neutralité religieuse ne serait enfreinte que si l’Etat contraignait un enfant à fréquenter une école religieuse. Et pourquoi ne serait-il pas conforme à la Constitution suisse que cette école ne soit ouverte qu’aux filles? Tant d’autres écoles secondaires sont, quant à elles, libres d’entrer en concurrence avec la Kathi, par exemple en se fixant des objectifs scolaires, artistiques et éthiques différents mais tout aussi particuliers.
    Par son jugement, le Tribunal fédéral outrepasse de surcroît l’ordre constitutionnel fédéraliste: selon l’article 62, alinéa 1 de la Constitution fédérale, la souveraineté en matière d’éducation appartient aux cantons. Après une longue et difficile bataille, le parlement de la ville de Wil avait approuvé, dans une décision démocratique, la prise en charge des frais de scolarité de la Kathi par la Caisse communale,  le tribunal administratif du canton de Saint-Gall ayant rejeté un recours contre cette décision. Certes, le Tribunal fédéral fait remarquer que «le principe de neutralité n’est pas absolu. Des pondérations différentes selon les cantons peuvent être admises». Le fait qu’il passe malgré tout outre la diversité fédéraliste du système scolaire suisse en exercice est inquiétant.
    Compte tenu du fait que 20% de nos élèves en fin de scolarité savent à peine lire, écrire et compter, nous devrions nous féliciter d’avoir à la disposition des élèves un établissement de la réputation de la Kathi, une école accordant une grande importance à l’éducation aux valeurs éthiques et à la performance scolaire et dont l’offre artistique variée encourage la créativité, la volonté de performance et les aptitudes sociales des jeunes (le succès incontesté de la Kathi reposant sur ces quatre principes de base: école des valeurs, école de performance, école à horaire continu, école de musique).
    Heureusement, les médias (même ceux dont l’orientation est parfaitement laïque!) ont émis leurs diverses protestations.
    Philipp Gut écrit par exemple, dans les colonnes de la «Weltwoche»: «Au lieu de promouvoir la liberté et la diversité, les juges suprêmes se mettent en scène comme les défenseurs d’une politique éducative uniformisée. Ô sainte simplicitude!»1 Quant à Katharina Fontana, dans la «Neue Zürcher Zeitung»: «Au lieu de chercher à élever le niveau dans les écoles publiques, on se contente de démolir la meilleure compétitivité. L’uniformisation doit prévaloir sur tout, même si elle fait baisser le niveau. La décision de la deuxième section de droit public a été prise par trois voix contre deux. Le jugement n’a pas grand-chose à voir avec le droit au sens strict, mais beaucoup avec la vision que les juges ont personnellement du monde».
    Il faut espérer que la «Kathi», en tant qu’école de droit privé défiée par le refus  des subventions accordées par la muncipalité de Wil, lui octroyé par l’arrêté du Tribunal suprême suisse, trouvera une solution pour continuer à accueillir des jeunes dont les parents ne peuvent que difficilement se prendre en charge des frais de scolarité. Toujours est-il que de nombreuses élèves se sont déjà inscrites pour la prochaine année scolaire.

1 Simplicitude: Art politique de la simplicité poussée à son paroxysme

Sources: Medienmitteilung des Bundesgerichts. Urteil du 17 janvier 2025 (2C_405/2022); Gut, Philipp. «Irrwege der Gleichstellung». Ds: Weltwoche Nr. 4/25 du 23.1.2025; Fontana, Katharina. «Aus für die Schule St. Katharina: Ideologie bringt die erfolgreiche Mädchenschule zu Fall». Ds: Neue Zürcher Zeitung du 20.1.2025; https://www.kathi.ch/4-saeulen/ 

 

 

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