L’Allemagne poursuit l’autodémolition de sa bonne réputation

Annalena Baerbock proposée pour un haut mandat diplomatique à l’ONU

par Michael von der Schulenburg et Hans-Christof von Sponeck*

Il fut un temps où l’Allemagne s’était forgé une solide réputation internationale au sein des Nations unies (ONU). Notre pays a joué un rôle actif dans le développement du droit international, par exemple dans l’adoption des Conventions sur les droits civils et politiques et sur les droits économiques, sociaux et culturels ainsi que dans la Convention de lutte contre la torture et, bien sûr, dans la Convention sur les droits des femmes.
    L’Allemagne est le quatrième plus important contributeur au budget des Nations unies. Dans le même ordre d’idées, l’Allemagne fournit d’importantes contributions volontaires aux missions de maintien de la paix des Nations unies.
    L’Assemblée générale des Nations unies a approuvé à une large majorité la décision du gouvernement fédéral de prendre, en collaboration avec le gouvernement namibien, la direction du programme de réforme des Nations unies. Cette coopération a permis à l’Assemblée générale des Nations unies d’adopter en septembre 2024 un pacte pour l’avenir des Nations unies.

En matière de politique étrangère,
Baerbock a massivement brisé la porcelaine

Pour autant, l’image de l’Allemagne dans le monde n’est plus aujourd’hui de celles qui nous font honneur. A maintes reprises, dans ses réactions aux grandes crises de notre époque, en particulier la guerre en Ukraine et le conflit dissymétrique entre la Palestine et Israël, le gouvernement sortant a fait preuve d’une insigne manque de droiture au regard des dispositions de la Charte des Nations unies et des Conventions de Genève. Le parti pris de la politique allemande dans ses prises de position n’a pas cessé de susciter l’incompréhension chez nous – et plus encore à l’étranger. Au cours d’une grande conférence internationale à Istanbul en 2023, nous avons pu constater, lors d’entretiens avec deux anciens ministres des Affaires étrangères, l’un du Moyen-Orient, l’autre d’Europe, à quel point ils étaient déçus par la politique étrangère allemande.
    En tant qu’anciens collaborateurs ayant œuvré pendant de longues années au sein des Nations unies, nous disposons d’un vaste réseau de contacts dans le monde entier. Nous constatons avec inquiétude que ces derniers ne cessent de dénoncer avec insistance l’étroitesse des marges de manœuvres à laquelle nous réduit la politique étrangère allemande. En Europe et dans le monde, l’Allemagne continue de perdre en réputation et en influence.
    «La politique étrangère se fait à la Chancellerie », avait un jour laissé entendre Rolf Mützenich, le chef du groupe parlementaire du SPD. Eh bien, cela ne se passe plus du tout ainsi. La politique étrangère, fragile porcelaine, a fait les frais de la casse provoquée intentionnellement par le chef du ressort des affaires étrangères, Annalena Baerbock.
    Pour reprendre les mots de Jeffrey Sachs, éminent professeur à l’université de Columbia et conseiller de trois secrétaires généraux de l’ONU: «Baerbock est une belliciste. Je n’arrive pas à croire les propos qui sortent de sa bouche». Sachs a rappelé qu’en tant que diplomate, un ministre des Affaires étrangères doit être prêt à parler à tout le monde.1 Mais Baerbock, dans ses interventions publiques, a montré à maintes reprises que telle n’était pas son intention.
    Pas question pour elle de favoriser l’apaisement des tensions ou les négociations de paix avec une volonté de compromis. Elle est tout sauf capable d’initier des rapprochements. Mme Baerbocka montré à plusieurs reprises qu’elle ne comprend ni le droit international ni l’esprit et l’éthique de la Charte des Nations unies. Elle l’a prouvé en déclarant qu’il fallait infliger à la Russie des dommages tels qu’elle «ne pourrait plus se remettre sur pied économiquement avant de nombreuses années» et, en ce qui concerne l’Ukraine: «Nous serons à vos côtés tant que vous aurez besoin de nous, quoi qu’en pensent mes électeurs allemands.»

Les autres pays refusent
de recevoir des leçons de l’Allemagne

Pour Baerbock, la «paix passe par la force», c’est-à-dire par la sécurité militaire et non la sécurité des personnes, celle que pourtant ne cessent de réclamer les Nations unies, en particulier l’Unicef, le PNUD, le Programme alimentaire mondial (PAM) et, bien entendu, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres.
    Il n’est pas nécessaire de préciser que l’actuelle ministre des Affaires étrangères a causé des dommages considérables à l’Allemagne et à l’Europe par le biais de ses nombreux voyages, généralement infructueux en termes de relations internationales. Les gouvernements de pays comme l’Inde, la Chine ou la Malaisie, mais également bien d’autres, ont attesté lors des visites de la ministre allemande des Affaires étrangères que sa façon de leur faire la morale et de leur donner des leçons était loin d’être la bienvenue.
    Mais pourquoi faire allusion à ce qui est évident? Parce que nous ne comprenons pas pourquoi, malgré la précarité caractérisant son mandat, le gouvernement fédéral sortant préfère Annalena Baerbock à Helga Schmid pour le poste de Présidente de l’Assemblée générale des Nations unies en 2025/26. Annalena Baerbock n’a aucune expérience multilatérale ou bilatérale, alors qu’Helga Schmid, en tant qu’ancienne Secrétaire générale de l’OSCE et diplomate exerçant des fonctions de direction au ministère des Affaires étrangères, dispose précisément de cette expérience dont les Nations unies ont un besoin urgent. Nous pensons que le nouveau gouvernement devrait sérieusement réfléchir à la manière dont l’Allemagne pourrait occuper comme il se doit cet important poste de Président de l’Assemblée générale des Nations unies, pour éviter que notre réputation dans le monde ne subisse de nouvelles atteintes. Et cela, à une époque où de nombreux gouvernements – notamment dans le monde non occidental – et organisations non gouvernementales militent pour une réorganisation plus juste et multilatérale, comme le prévoit le Pacte des Nations unies pour l’avenir des Nations unies.

1Berliner Zeitung du 2/02/2025

Première parution Berliner Zeitung du 25/03/2025; reproduction avec l’aimable autorisation des auteurs

(Traduction Horizons et débats)

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